La distinction à l’épreuve du temps

Responsables scientifiques: Karine-Larissa Basset, Véronique Peyrache Gadeau

La labellisation territoriale connait un intérêt croissant. Les labels se sont étendus à de multiples objets matériels et immatériels (produits sous signes de qualité, marques touristiques, labels culturels, patrimoniaux, écologiques…) mobilisés comme marqueurs de distinction de la territorialité. Le phénomène est particulièrement rendu visible en zones de montagne où ces marqueurs ont été construits parfois de manière très novatrice. Si l’on adopte une vision des processus de distinction territoriale sur la base « de l’identification, de la caractérisation des lieux, pour obtenir protection et/ou notoriété à diverses échelles » (Fournier, 2015), ces phénomènes peuvent être observés dès le XIX^e siècle comme une forme culturelle de rapport aux lieux et au temps. Ils se sont amplifiés depuis la seconde moitié du XX^e siècle avec la multiplication des dispositifs de protection des espaces naturels et construits, et l’inscription des territoires dans des logiques concurrentielles. En zones de montagne, comme dans d’autres territoires, la quête de distinction s’énonce tout autant selon le registre de la compétitivité et du renouvellement de l’attractivité, que selon le registre patrimonial et identitaire, mobilisant parfois les deux types d’arguments dans une même intention projective.

La session devra permettre de confronter les analyses de ces processus de labellisation des territoires au regard des changements contemporains et dans leur temporalité longue. La question des intentions projectives à l’origine de la labellisation et des modalités de son maintien ou de son renouvellement dans le temps sera particulièrement centrale. Il s’agira ainsi de mieux comprendre le sens des évolutions et de l’emballement actuel de la recherche de singularité territoriale.

Nous privilégierons :

• Des approches centrées sur les projets de labellisation et les acteurs mobilisés: leur caractérisation, leur interaction pour faire exister le projet, leurs intentions, leurs représentations et pratiques des lieux, leurs attentes vis-à-vis d’une reconnaissance de singularité territoriale (il s’agira alors de qualifier les changements attendus); mais aussi des études sur la réception de ces processus de distinction.
• Des méthodologies permettant de lire les processus actuels de distinction territoriale dans la durée (ex: une démarche de labellisation succède-t-elle à des formes de distinctions plus anciennes sur un même territoire, ou sur partie de celui-là ? Quelles articulations entre ces processus sur le plan des acteurs, des objets distingués, des intentions, des attentes?)
• La diversification des terrains d’étude afin d’obtenir un panel de situations montagnardes, mais sans exclusive ; la qualité de « territoire de montagne » étant entendu ici comme une donnée phénoménologique et/ou conventionnelle. On prêtera attention aux éléments qui, dans les processus de distinction et les projets de territoire sous-jacents, peuvent spécifier plus particulièrement cette dimension « montagne ».

Territorial labelling: holding on to heritage and innovating? Putting “distinction” to the test of time

Lead scientists: Karine-Larissa Basset, Véronique Peyrache-Gadeau

Today there is an increasing focus on territorial labelling (or certification). These labels have been extended to all sorts of tangible and intangible objects (quality seals on products, tourism brands, cultural, patrimonial and ecological labels, etc.) that are requisitioned as markers of the territoriality’s distinction. The phenomenon has become particularly visible in mountain regions, where these markers have sometimes been established in a highly innovative manner. If we consider the processes involved in territorial distinction on the basis of the «identification, characterisation of the places, to obtain protection and/or notoriety at various scales» (Fournier 2015), these phenomena can be observed as early as the 19th century as a cultural rapport with places and with time. They have been accentuated since the second half of the 20th century with the proliferation of measures for protecting natural and built spaces, and the adoption of competitive reasoning by these territories. In mountain areas, as elsewhere, the quest for distinction is expressed in terms of competitiveness and renewed attractiveness as much as it is in terms of heritage and identity. Now and then, both arguments are called upon within the same projective intention.

This session should serve to confront different analyses of these labelling/certification processes in the light of contemporary changes and their prolonged time frame. The issue of the projective intentions behind these labels and certificates, and the methods adopted to maintain or renew them over time will be central to the session. The underlying objective is therefore to better understand the meaning of developments, and the present craze for acquiring territorial singularity.

We will give preference to:

• Approaches centred on labelling projects and the players involved: their characterisation, their interaction to bring these projects to life, their intentions, their representations of the place and its practices, their expectations in terms of recognition of territorial singularity (expected changes must be qualified), as well as studies on how these processes of distinction are perceived.
• Methodologies for interpreting the current processes of territorial distinction in the long term (e.g. does a labelling approach follow on from older forms of distinction for that same territory, or for a part of it? what are the relationships between these processes in terms of the stakeholders, the objects actually distinguished, intentions, expectations, etc.?).
• Diverse fields of study to obtain a panel of mountain situations, where none are excluded; here the status «mountain territory» is understood as a phenomenological and/or conventional consideration. Attention will be paid to elements which, as part of the processes for distinction and of the underlying territory projects, can identify this «mountain» aspect more specifically.